Letzte Aktualisierung am 10/09/2019.
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Letzter Eintrag am 09/09/2019
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Jour terriblement beau
Jour terriblement beau
- Outer Banks, avril 1995 -
Translator: Marc Giannésini and Silke Hass
- Outer Banks, avril 1995 -
Translator: Marc Giannésini and Silke Hass
Original title: Schrecklich schöner Tag - Matthias Politycki
02/04/2000
published in: Ratschlag zum Verzehr der Seidenraupe (Advice on the Consumption of Silkworms)
02/04/2000
published in: Ratschlag zum Verzehr der Seidenraupe (Advice on the Consumption of Silkworms)
- Süddeutsche Zeitung, 28+29/4/01
Il y a quelques îles face à la côte
de la Caroline du Nord, nombreux bancs de sable, pas beaucoup
plus larges que la route, cependant
longs de presque deux cents milles ! rien
que des phares, des dunes et des herbes gris-jaune,
des mouettes, naturellement, aux têtes blanches
et noires
Alors, figure-toi, moi, je
suis assis dans ma Chevrolet verte, étincelante,
et je traverse ainsi la mer, très décontracté :
l’homme à la radio joue la musique idéale,
l’air conditionné ronronne tout doucement, même la
vitesse, je l’ai réglée automatiquement,
tout compte fait, je n’ai rien d’autre à faire
que d’écarquiller les yeux et de tendre l’oreille
Tu comprends,
le monde, ce jour-là,
je ne veux vraiment pas me plaindre,
a fait un très grand effort pour moi :
tant de vagues, tant d’espace vide au-dessus,
tant de vent caressant et... pourtant !
Quand je serai bientôt de retour chez moi
(dans une, deux, peut-être trois semaines),
il n’y aura personne qui
partagera le souvenir de ce jour presque parfait.
« Ah, très intéressant, m’accordera-t-on à la limite avec
un hochement de tête, une sorte de Sylt
à l’am’ricaine »...
Mais tu sais,
ce jour-là, sur la route, dans la mer,
il n’était pas intéressant –
il était plutôt si beau
que j’aurais presque pleuré comme un veau,
avec mes quarante-quatre ans,
car je savais bien,
je savais à chaque instant,
que jusqu’au bout de la vie
je serais condamné à rester sacrément seul
avec tous ces phares, ces mouettes, ces vagues,
avec tous les brownies que j’ai mangés ce jour-là en conduisant,
avec les canettes que j’ai vidées là-bas
: dans ma grosse Chevrolet étincelante,
ce jour si terriblement beau
de la Caroline du Nord, nombreux bancs de sable, pas beaucoup
plus larges que la route, cependant
longs de presque deux cents milles ! rien
que des phares, des dunes et des herbes gris-jaune,
des mouettes, naturellement, aux têtes blanches
et noires
Alors, figure-toi, moi, je
suis assis dans ma Chevrolet verte, étincelante,
et je traverse ainsi la mer, très décontracté :
l’homme à la radio joue la musique idéale,
l’air conditionné ronronne tout doucement, même la
vitesse, je l’ai réglée automatiquement,
tout compte fait, je n’ai rien d’autre à faire
que d’écarquiller les yeux et de tendre l’oreille
Tu comprends,
le monde, ce jour-là,
je ne veux vraiment pas me plaindre,
a fait un très grand effort pour moi :
tant de vagues, tant d’espace vide au-dessus,
tant de vent caressant et... pourtant !
Quand je serai bientôt de retour chez moi
(dans une, deux, peut-être trois semaines),
il n’y aura personne qui
partagera le souvenir de ce jour presque parfait.
« Ah, très intéressant, m’accordera-t-on à la limite avec
un hochement de tête, une sorte de Sylt
à l’am’ricaine »...
Mais tu sais,
ce jour-là, sur la route, dans la mer,
il n’était pas intéressant –
il était plutôt si beau
que j’aurais presque pleuré comme un veau,
avec mes quarante-quatre ans,
car je savais bien,
je savais à chaque instant,
que jusqu’au bout de la vie
je serais condamné à rester sacrément seul
avec tous ces phares, ces mouettes, ces vagues,
avec tous les brownies que j’ai mangés ce jour-là en conduisant,
avec les canettes que j’ai vidées là-bas
: dans ma grosse Chevrolet étincelante,
ce jour si terriblement beau